vendredi 27 février 2009

Dinah Shore, la voix de miel




« J’ai loupé ma carrière au cinéma » avait coutume de déclarer Dinah Shore, la plus populaire chanteuse américaine des années 40, qui s’est si bien reconvertie par la suite dans l’animation de talk shows. Passage à basse altitude sur la carrière de cette crooneuse.


Née en 1917, Frances Rose Shore a emprunté son prénom d’artiste à une célèbre chanson de l’époque. Après avoir chanté au collège, elle débute à la radio à la fin des années 30 dans les shows d’Eddie Cantor. Sa voix particulièrement suave, qui s’inspire un peu du style bluesy de l’artiste black Ethel Waters est tout de suite remarquée par les auditeurs. Après quelques refrains chantés pour l’orchestre de Xavier Cugat, elle entame rapidement une carrière solo, ce qui était fort rare en ce début des années 40, grande période des big bands. Le succès est immédiat : the blues in the night (1942) est un très gros succès populaire. Toujours avec l’aide d’Eddie Cantor, Dinah débute à Hollywood (après une opération de chirurgie esthétique et séjours dans les instituts de beauté). Remerciez votre bonne étoile (1943) produit par la Warner est un musical sympa, dans lequel toutes les vedettes sous contrat viennent pousser la chansonnette ou tenter un pas de danse, ou juste faire une apparition furtive. Même si ce film retient aujourd’hui l’attention par les amusantes prestations chantées de Bette Davis, Errol Flynn ou Ida Lupino, il est certain que sur un plan strictement vocal, Dinah chante mieux qu’eux.


Très active pendant la guerre, Dinah participe à des tournées en Europe pour entretenir le moral des GI (son image en sortira considérablement grandie). En 1944, après la libération de Paris, elle donne un show devant le château de Versailles pour les alliés. Il était logique qu’elle participe à une des comédies musicales patriotiques multi-stars bâties pour les soldats. Dans Hollywood parade (1944) elle chante I’ll walk alone (une chanson pour les épouses des prisonniers qui remportera aux States un succès similaire à je suis seule ce soir ou j’attendrai chez nous. Le meilleur rôle de Dinah au cinéma demeure « Un fou s’en va t’en guerre » (1944) comédie musicale fort drôle où Danny Kaye, dans son premier rôle, est génial et envahit littéralement l’écran. Cependant armée de très bonnes chansons, Dinah parvient quand même à sauver son épingle du jeu.En revanche, la fille aux doigts dorés (1945) avec la strip-teaseuse Gypsy Rose Lee, est un bien médiocre western musical. Les cheveux teints couleur carotte, ronronnant des romances soporifiques, Dinah n’est guère à son aise ici.

Elle chante encore une ou deux chansons dans la pluie qui chante (1946) dont the last time I saw Paris, la bio de Jérome Kern, sans s’y faire trop remarquer.En dépit de sa voix melliflue, le manque de présence à l’écran de Dinah lui sera préjudiciable pour continuer sa carrière au cinéma. On utilise néanmoins sa voix pour des dessins animés de Disney (elle chante two silhouettes dans la boîte à musique (1948)- en France doublée par Renée Lebas dont la voix ressemble un peu)


En 1951, le producteur Dore Shary propose à Dinah d’incarner la mulatre Julie dans le remake de Show boat. Sans craindre d’accréditer certaines rumeurs qui prétendent depuis le début de sa carrière que Dinah Shore est d’origine « mixte » (ce qui à l’époque était considéré comme horrible dans ce pays très raciste- on lui reprochera par la suite d’inviter trop d’artistes blacks dans ses shows télé), la chanteuse accepte d’abord la proposition. Finalement, Arthur Freed lui fait alors comprendre qu’elle avait trop de classe pour jouer le rôle qui échoira à Ava Gardner (tant mieux, car elle y est merveilleuse).Si Dinah Shore a échoué sur grand écran, par contre, elle a fait un carton total à la télévision.Son sens de la convivialité (elle envoie son fameux baiser sonore au public à la fin de chaque show), ses qualités d’animatrice lui vaudront de connaître une incroyable longévité sur ce média.

Après avoir atteint des records d’audimat dans les années 50 avec ses émissions de variété, elle se dirige ensuite vers l’animation de talk shows, et sera à l’initiative des premiers talk shows matinaux de l’histoire de la télé (l’équivalent de télématin). Dans ses programmes se côtoient le meilleur comme le pire, de David Bowie à la baronne Von Trapp, à tel point que les pires moments ont fait l’objet d’un DVD « Dinah Shore, les portes de l’enfer » avec notamment une catastrophique prestation d’Hervé Villechaize, le nain Tatou du feuilleton l’île fantastique :!


Dans les années 70, sa liaison avec Burt Reynolds (20 ans de moins qu’elle) déchaînera la presse people. Dinah Shore est décédée en 1994 d’un cancer. Son indéboulonnable présence sur les petits écrans américains en avait fait une véritable amie des téléspectateurs. Si ces films n’ont pas marqué, ses nombreux disques (notamment buttons and bow (ma guépiere et mes longs jupons » son tube tiré du film Visage pâle) valent le détour.


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