mercredi 9 septembre 2009

Juliet Prowse, toute en jambes










Avec ses grands yeux lui mangeant le visage, une frimousse à la Leslie Caron, des jambes aiguisées et flexibles comme les pointes d’un compas, la danseuse Juliet Prowse avait quelques bonnes cartes dans son jeu pour se faire une place sous le soleil hollywoodien. Hélas, l’âge d’or du musical touchait alors à sa fin, et la copine de Frank Sinatra et d’Elvis Presley dut se rabattre sur les cabarets et les music halls pour poursuivre sa carrière.

Née à Bombay (Inde) en 1936, Juliet Prowse a passé son enfance en Afrique du Sud et fait ses premières armes au festival de Johannesburg avant de partir poursuivre ses études à Londres. Son ascension dans le monde du show business est très rapide :
Dès l’âge de 19 ans, elle tient le rôle de la princesse dans l’opérette Kismet- l’étranger au paradis et obtient un succès instantané. Après avoir dansé dans un cabaret topless de Paris, elle est remarquée par le chorégraphe Hermes Pan , qui ébloui, s’arrange pour la faire venir à Hollywood. La Fox lui signe un contrat pour remplacer Barrie Chase dans la version filmée de l’opérette Can-Can de Cole Porter (1960). Le président Khrouchtchev, alors en visite sur les plateaux de la Fox, fit une publicité inattendue au film; en déclarant avoir trouvé la chorégraphie « immorale». En fait, le film est bien décevant en dépit de ses immortelles chansons, et Shirley Mac Laine pas vraiment à son aise dans le rôle principal. Si les critiques fusent, Juliet s’en sort avec les honneurs et surclasse de loin la star rousse dans les numéros dansés (le numéro Adam et Eve). Son idylle avec Frank Sinatra s’étale sur les journaux people, pendant qu’elle joue aux cotés d’Elvis Presley dans café Europa en uniforme (1961), un véhicule sur mesure taillé pour le King dans lequel elle partage un duo avec l’idole. Là aussi, la danseuse tire son épingle du jeu et certains journaux la présentent comme la star de demain. Alors qu’elle sort avec Sinatra, on lui prête parallèlement une liaison avec Elvis, et la Fox souhaite à nouveau les réunir à l’écran…
Pourtant, la machine va très vite s’enrayer. La jeune actrice se révèle capricieuse et exigeante : elle refuse le rôle, pas assez valorisant, quelques jours avant le tournage, s‘attirant la foudre des producteurs. Ces derniers ne feront rien pour promouvoir la suite de sa carrière.
Les révoltés du Cap (1961), qui met en scène platement la lutte entre les boers et les zoulous au milieu du 19ème siècle, permet à l’actrice de retrouver son pays et sa famille et la coqueluche de l’Arizona (1961) une comédie avec un rôle taillé sur mesure pour Debbie Reynolds où Juliet ne joue que les faire valoir. Destiné à établir le crooner britannique Frankie Vaughan à Hollywood après son essai dans le milliardaire, the right approach (1961) avec ses insipides chansons n’atteindra pas son but.
En 1962, l’actrice rompt avec Presley pour se fiancer avec Sinatra…avant de le quitter quelques semaines plus tard. Le célèbre crooner, échaudé par l’échec de son mariage avec Ava Gardner, voulait que Juliet abandonne sa carrière. Elle se consolera dans les bras du crooner Eddie Fisher, l’infidèle mari d’Elizabeth Taylor, connu pour ses multiples aventures. De retour sur les planches, elle se produit dans différents shows à Las Vegas, dont certains spécialistes soulignent le mauvais goût.
On annonce alors à grand renfort de publicité qu’elle sera la vedette d’une sitcom à la télé. Pourtant la nouvelle Lucille Ball disparaît vite des grilles de programmation.
De retour sur grand écran, on la retrouve dans un petit polar camp « Who killed Teddy bear?« avec Sal Mineo, dans le rôle d’un psychopathe et maniaque sexuel (qui a acquis un statut de film culte auprès du public gay et des amateurs de bizarreries en raison de son audace ). Juliet Prowse n‘a jamais été aussi sexy que dans son numéro de danse avec Sal Mineo, qui compte parmi les meilleurs de toute sa carrière.
Le tournage de Dingaka le sorcier, film d’aventure de série B, lui donne à nouveau l’occasion de retourner en Afrique du sud. On l’aperçoit aussi dans une comédie italienne (mes femmes américaines) avec Ugo Togniazzi et Marina Vlady. Spree (1966) est un documentaire sur Las Vegas by night avec des extraits de numéros de cabarets du crooner Vic Damone, de la revue menée par Jayne Mansfield ou du show de Juliet, en Cléopatre.
De moins en moins demandée au cinéma, la danseuse est en effet retournée sur les scènes de music hall, et remporte un franc succès dans la version londonienne du musical Sweet charity, qui lui vaudra le prix de la meilleure danseuse. Elle est aussi une bonne cliente des shows télé car elle chante presque aussi bien qu’elle danse, comme le prouve son admirable prestation dans un show de Burt Bacharach où elle chante un medley des Beatles avec une grandiose Dusty Springfield et une Mireille Matthieu pas à sa place. La danseuse fait aussi beaucoup de spots publicitaires pour des cosmétiques.
En 1989, lors d’un gala de l’union des artistes, elle manque de se faire dévorer par un fauve (une pareille mésaventure était arrivée en France à Jacqueline Dulac). Jusque dans les années 90, Juliet Prowse a animé des compétitions de danse de salon et joué dans des musicals comme Mame ou sugar babies (en reprenant la place d’Ann Miller), malgré ses problèmes d‘arthrite. Atteinte d’un cancer du pancréas, elle nous a quitté en 1996.
Dommage que le cinéma ne nous ait pas donné davantage l’occasion d’admirer celle qui fut selon son amie Barbara Eden « l’une des plus grandes danseuses de tous les temps ».






1 commentaire:

  1. Ah, très bien ! Très bath, comme on disait. Je crois que je vais vous piquer l'extrait un de ces quatre. ;)

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