dimanche 13 décembre 2009

Rosita Fornes, une diva cubaine controversée






Il est toujours surprenant d’apprendre que l’une des plus grandes stars des scènes musicales cubaines, et en tous cas, celle dont la carrière est la plus longue (la dame est toujours en activité) n’est pas une brune danseuse ou chanteuse de mambos, congas, rumbas et autres rythmes tropicaux, mais une pin up blonde hyper sophistiquée, parfois comparée à Marilyn Monroe , dotée d’une voix de soprano, dont le répertoire se composait davantage d’airs d’opérette et de standards internationaux ( beaucoup de chansons d’origine française ou italienne) que de congas ou salsas. Véritable sex symbol dans les années 50 et 60, dotée d’une indéniable présence, Rosita Fornes a souvent déchaîné les passions (notamment pour son silence concernant le régime castriste) et continue d’être respectée dans son pays où elle poursuit sa carrière, depuis plus de 70 ans !

De parents émigrants espagnols, Rosita Fornes est née à New York en 1923, mais a vécu à Cuba depuis l‘âge de 2 ans. Lors d’un séjour en Espagne juste avant la guerre civile, la fillette s’est entichée du répertoire des grandes divas de l’époque, Conchita Piquer, Imperio Argentina et Estrellita Castro.


Avec l’aide de son beau père, un riche homme d’affaires guadeloupéen, elle s’inscrit à un concours de chant radiophonique extrêmement populaire. Elle remporte à 16 ans le premier prix qui la rend célèbre dans toute l’île. Après avoir perfectionné son art, en suivant des cours de chant et de danse, la jeune artiste est engagée pour une série d’opérettes viennoises et des zarzuelas, avec notamment les parents de Placido Domingo. Elle s’essaie aussi à la comédie dans de nombreuses pièces de théâtre abordant des pièces aussi différentes que la dame aux camélias de Dumas fils, Topaze de Pagnol ou la maison de poupées d’Ibsen. En 1939, elle fait ses débuts à l‘écran dans l‘adaptation d‘un feuilleton radiophonique. et joue deux ans plus tard aux cotés de Rita Montaner, la plus grande chanteuse cubaine des années 30 (la créatrice du fameux Siboney de Lecuona) dans Romance musical. A 20 ans, elle tente sa chance au Mexique, où elle obtient un succès égal et immédiat qui lui vaudra d’être surnommée la première star d’Amérique latine. La grande beauté de son visage, sa sophistication, son élégance émerveille un public fasciné par les blondes exotiques (Miroslava notamment).
Pendant son séjour mexicain, Rosita va tourner plusieurs comédies musicales pour le cinéma dont elle n‘est pas du tout fière et qu’elle n’hésite pas à les qualifier d’incidents, de productions commerciales et sans intérêt.
Mujeres de teatro (1951) est un who done it de facture ultra classique : un impresario a été assassiné : qui l’a tué? la chanteuse de boléros , Maria Victoria, Rosita ou une autre encore. Lors des nombreux intermèdes musicaux, Rosita chante quelques mélopées exotiques de sa jolie voix éthérée et danse le cancan en levant la jambe plus ou moins haut. Elle est radieuse et très belle (et hyper sexy dans la scène où elle se déshabille derrière un paravent translucide pondant son interrogatoire), et n’a pas de mal à éclipser les autres comédiennes.
Du cancan au mambo est une comédie qui met en opposition deux danses qui ont fait fureur au 19e et au 20ème siècle, Est-il besoin de préciser que Rosita est plus can-can que mambo? Elle reprend la violettera, le fameux tube de Raquel Meller : Cependant, on retiendra surtout les nombreux airs joués par l’orchestre de Perez Prado au faite de sa gloire.
Avec son premier mari Manuel Medel, elle fonde une compagnie théâtrale qui se produit dans toute l’Amérique du sud et un peu aux USA. Néanmoins, Medel n’est pas le seul à succomber à son charme.
Le président mexicain Miguel Alleman aurait lui aussi craqué pour la belle cubaine.
Parmi les autres amants qu’on a prêté à Rosita figurent le Président cubain Prio Socarras (de 1948 à 1952), le dictateur Fulgencio Batista (qui sera chassé du pouvoir par Fidel Castro) et encore plus étonnant le révolutionnaire argentin Ernesto 'Che' Guevara. On ne peut que rester pantois devant un tel tableau de chasse, et c’est vrai que l’image du charismatique révolutionnaire et de la Marilyn cubaine a tout pour exciter l’imagination! Rosita a toujours démenti ces rumeurs, tout en admettant avoir toujours été très courtisée par des hommes d’Etat. En revanche, elle admet avoir vécu une folle passion pour l’acteur comique Cantinflas, le plus populaire d’Amérique latine, qui physiquement en imposait moins que le Che!

Après son divorce, l’actrice regagne Cuba où elle va énormément paraître à la télévision, média qui sans nul doute aura le plus contribué à son succès et sa pérennité ainsi qu’au fameux cabaret Tropicana.
C’est dans le fameux cabaret que se déroule action de Tin Tan à la Havane (1953) où Rosita donne la réplique au fameux German Valdes, un des comédiens les plus attachants du cinéma mexicain.
En 1956, on la retrouve dans un mélo ultra conventionnel « No me livides nunca », en star de cinéma qui vit une passion secrète avec un chanteur mexicain (ici le monolithique Luis Aguilar). Le scénario s’inspirait-il de son coup de cœur pour Cantinflas? En tous les, la présence de pointures comme Benny More ou Olga Guillot apportent une plus value appréciable.

En 1957, l’artiste toujours en quête de nouveaux horizons, décide de tenter cette fois sa chance en Espagne : là aussi, elle rencontre un succès foudroyant dans une opérette quand la révolution cubaine est déclarée et Fidel Castro se retrouve à la tête de l’Etat. Alors que les stars cubaines comme Celia Cruz ou Olga Guillot choisissent de s’exiler, Rosita Fornes, contre toute attente, quitte alors précipitement l’Espagne pour se rendre à la Havane. On peut vraiment s’interroger sur les motivations de la star (il semble qu’elle voulait tout simplement rejoindre sa famille en ces périodes troublées ), à laquelle certains détracteurs ne vont pas manquer de reprocher son asservissement et son silence face à un régime politique criminel. Rosita s’est pourtant toujours déclarée apolitique et catholique.
En 1967, elle promène son spectacle « variétés de la Havane » derrière le rideau de fer et fait pas mal de télévision en URSS.
Défiant les années (grâce au soutien de la chirurgie esthétique) , toujours vêtue de robes vaporeuses , de rubans et de boas, Rosita Fornes continue de hanter les petits écrans cubains , telle une éternelle Marilyn Monroe. A son répertoire d’opérettes et de zarzuelas, la chanteuse a rajouté pas mal de compositions françaises comme Ma vie d’Alain Barrière (un méga succès en Amérique latine), la Mamma d’Aznavour, ou des succès italiens tirès des répertoires de Mina ou Johnny Dorelli. Très à l’aise vocalement, ses interprétations sont souvent très réussies (dommage que la qualité d’enregistrement ne soit pas optimale).

En 1984, Rosita fait son come back à l’écran dans les années 80 avec L‘échange, une comédie inégale dans laquelle elle incarne une énergique quinquagénaire qui échange sa vieille maison (pratique très courante là bas) pour un appartement moderne dans le Vedado en vue d'éloigner sa fille d'un mécanicien.

En 1994, on la retrouve dans le mélodrame tragi-comique Quiereme y veras du réalisateur très controversé Daniel Diaz Torres (certains de ses films jugent trop critiques à l’égard du régime furent interdits) qui retrace un cambriolage sur fond de révolution cubaine en 1958.

Si Rosita demeure une reine du show business à Cuba (aussi adulée que Fidel Castro), elle n’est plus la bienvenue aux USA.
Son passage en Floride en 1996, va déchaîner une véritable cabale médiatique . Des organisations représentatives des exilés cubains reprochent à la star d’avoir toujours cautionné le régime castriste. Un cocktail Molotov est jeté dans la salle de spectacle de Miami où la star doit donner son tour de chant pendant 5 jours. Elle est également prise à parti et insultée de tous les noms (communiste, momie vivante) par des manifestants . Les concerts seront bien sûr annulés. Assaillie par les journalistes, la star déclara qu’elle ne veut pas donner d’explications sur les décisions qu’elle a prises au cours de sa vie, et qu’elle n’a rien à clarifier, que ses amis ont le droit de penser ce qu’ils veulent, en précisant que « si on vit dans un pays, on doit en accepter les lois » et qu’elle ne tient pas à trahir un pays qui lui a toujours été reconnaissant.
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Rosita Fornes est toujours une diva hautement respectée à Cuba et une invitée incontournable pour des festivités aussi diverses que l’élection de Miss travesti. Ses nombreux liftings lui ont permis de garder longtemps un visage défiant les outrages du temps. Elle affectionne toujours les tenues ultra glamour, les paillettes et le rose bonbon, même si à 86 ans passés, elle frise un peu le ridicule, il faut bien l’avouer . Ce qui ne semble pas gêner ses fans les plus acharnés, qui se composent à présent en grande partie d’homosexuels, fascinés et peut être amusés par cette diva éminemment camp.
Rappelons à cette occasion que certains d’entre eux furent enfermés dans les années 60 « en camp de travail » afin d’être « rééduqués », et qu’il y subirent des brimades et de mauvais traitements ;
L’ icône gay s’est dépensée sans compter pour les victimes du sida en chantant dans les hôpitaux.

Pour la retrouver au sommet de sa beauté et de son talent, il est possible de dénicher sur des sites cubains des Cds et DVDs de qualité plus que perfectibles mais qui nous permettent de découvrir une étoile lumineuse et d’une ineffable beauté. Et ceux qui auront la chance de visiter Cuba pourront toujours aller l'applaudir, puisque la diva est encore en activité.




7 commentaires:

  1. Ernesto Guevara* avait un faible pour les déesses de l'écran : il a poursuivi de ses avances officielles Chelo Alonzo, autre créature à la plastique impeccable, pour la faire rentrer à Cuba après la révolution selon un admirateur de la belle.

    * Une enquête est à faire sur les liens entre des hommes d'Etat quasi priapiques et les actrices. (le pouvoir et le désir...) De Gœbbels à JF Kennedy, la liste est longue...

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  2. C'est vrai RenéClaude, il y aurait de quoi rédiger tout un ouvrage!

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  3. Quel personnage passionnant!
    Quelle envoûtante beauté!

    Un gros merci!

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  4. Voici:

    http://www.youtube.com/watch?v=oGxrwkbQVAs

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  5. Merci pour le lien! En effet, cet extrait est vraiment un must de glamour!

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  6. Bella, Atractiva, Graciosa, Buena Actris, Bailarina y Cantante en Teatro, Cine y Television!!! Todo eso y mucho mas es La Fornes! Rosita Fornes!
    /Rey Gonzalez.

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  7. Es bella nustra rosa fornes nuestra Diva Cubana la unica Bedet Cubana que Dios le de larga VidA

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