vendredi 23 avril 2010

Dorothy Lamour, déesse de la jungle






Vénus des mers du sud, la brune Dorothy Lamour reflète toute la magie du cinéma hollywoodien d’autrefois où tous les rêves étaient permis et où sa voix mélodieuse et langoureuse berçaient plus d’un film d’aventure ou comédie musicale. Peinturlurée de fond de teint , vêtue d’un sarong, adossé contre un arbre, cette jolie sirène des années 40 représente presque un mirage d’un monde aujourd’hui perdu. Une fine comédienne qui a également su évoluer avec humour dans des farces déjantées aux cotés du crooner Bing Crosby et de Bob Hope.

Née en 1914 à la nouvelle Orléans , Dorothy Lamour a travaillé très jeune pour subvenir aux besoins de sa famille. Alors qu’elle vend des jouets dans un grand magasin, la jeune fille se présente à un concours de chant à Chicago. Repérée par le chef d’orchestre Herbie Kaye, Dorothy est engagée dans sa formation pour des tournées à travers les USA et des émissions de radio très populaires. Elle devient aussi l’épouse d’Herbie. De passage à Hollywood , la belle est remarquée par louis B Mayer et d’autres producteurs mais la maladresse de son impresario lui fait perdre bien des opportunités. Finalement la Paramount lui propose d’incarner « Hula, fille de la brousse » dans une jungle de pacotille. Couverte de peinture foncée (qui lui vaudra des problèmes cutanés), flanquée du chimpanzé Bogo et du tigre Kimau, Dorothy chante et enchante le public avec son personnage de Tarzane.
Tout en poursuivant les tournées avec son mari, la nouvelle star sous contrat avec la Paramount tient des rôles secondaires dans plusieurs musicals de la Paramount comme la furie de l’or noir (1937) où elle est éclipsée par Irène Dunne. Conscient du potentiel de la brunette, Samuel Goldwynn l’emprunte à la Paramount pour Hurricane de John Ford. Son rôle de fille de îles enthousiasme le public et les journaux de cinéma qui se focalisent sur sa beauté « typée » comme on disait à l’époque. Elle enregistre aussi la chanson du film « the moon of Monakoora » une mélodie hawaïenne entêtante, qui fait un tabac (reprise en France par Elyane Célis). Désormais abonnée aux rôles de natives, Dorothy Lamour sera successivement « Toura la déesse de la jungle » (au milieu de vilains indigènes qui veulent jeter aux crocodiles les hommes blancs), l’héroïne du Typhon (en technicolor et sarong raccourci ), Aloma le reine des îles (avec un Jon Hall tout en muscles) ou la comparse de Mahok, éléphant du diable (qui fera beaucoup rire quelques critiques acerbes) …et d’autres fantaisies tropicales qu’on aimerait bien revoir aujourd’hui et dont la saveur faussement exotique a pris un goût délicieusement kitsch.
Pour promouvoir certains films, Dorothy donnait un tour de chant en première partie , avec son sarong et ses bracelets, dans les salles obscures de New York.
Dorothy Lamour paraît également dans des comédies musicales (Saint Louis blues, l’escadre est au port) de facture classique ou dans des polars de qualité (Johnny Appolo avec Tyrone Power) ou encore des films à costumes comme la belle écuyère où pour une fois, elle est saluée pour son interprétation, sans rencontrer l’adhésion du public. Humble et lucide, Dorothy Lamour n’a jamais prétendu être une grande comédienne; Aux journalistes lui demandant si elle avait pris des cours de chant ou de comédie , elle répondait « non, ça se voit! ».
En 1940, Dorothy triomphe dans la route pour Singapour, une comédie musicale burlesque aux dialogues délirants avec Bing Crosby et un Bob Hope extravagant. Le succès est tel que plusieurs suites seront tournées avec le même trio tour à tour au Maroc, à Rio puis à Bali. Outre des jolies chansons languissantes, Dorothy est impeccable dans ce genre de comédies loufoques où sa malice et son ton moqueur apportent un zeste bienvenu à ce cocktail de fantaisie.
Divorcée d’Herbie Kaye, la star qui se consacre sans compter aux œuvres de charité et à l’effort de guerre (on raconte qu’elle a réussi à vendre plus de bons de guerre qu’aucune autre vedette) sort souvent avec JE Hoover, patron de la CIA, avec lequel elle restera liée jusqu’à sa mort. Il semble à posteriori qu’il s’agissait bien plus qu’une tendre amitié mais l’actrice épousera portant le capitaine WR Howard.
En 1944, elle crée le slow It should happen to you dans le musical 4 flirts et un cœur avec la pétulante Betty Hutton. On la retrouve ensuite dans le remake musical de la baronne de minuit « Mascarade à Mexico » de Mitchell Leisen, son réalisateur favori. Toujours aussi modeste, l’actrice aurait alors déclaré : le script est trop bon, il y a des dialogues, ce n’est pas pour moi! Avant d’être convaincue par le réalisateur . Si le résultat est décevant (il semble que quelques chansons et passages soient tronqués dans la version subsistante), la prestation de Dorothy est tout à fait honorable.
Désireuse de faire évoluer sa carrière vers des films plus ambitieux, l’actrice n’hésitera pas à brûler symboliquement son sarong devant la presse spécialisée. Mais est-il facile d’abandonner si facilement une image qui vous colle à la peau?
Après avoir formé un amusant tandem avec Bob Hope dans la brune de mes rêves, l’actrice s’est fourvoyée dans les corsaires de la terre, film d’aventure descendu par la critique avec une rare violence.
La Paramount qui en profitait pour rajeunir son staff d’acteurs rendit sa liberté à Dorothy afin de lancer de nouvelles actrices plus jeunes.
Hélas, les quelques films que l’actrice tournera en free lance n’auront aucun impact auprès de public. Danseuse de cancan dans slightly french (1949) ou chanteuse de la belle époque dans lulu Belle (condamné par une ligue de décence comme amoral), Dorothy n’a pas le même attrait qu’en sarong .
Elle accepte de se produire en tour de chant au Palladium de Londres où elle remporte un franc succès.
En 1952, Dorothy fait son come back à l’écran dans Sous le plus grand chapiteau du monde, une superproduction de Cecil B de Mille, souvent rediffusée à la télévision. Un film mémorable m^me si le rôle de Dorothy est plutôt effacé. Après une dernière pirouette dans Bal à Bali avec ses copains Bob Hope et Bing Crosby (et en sarong comme autrefois), Dorothy quitte l’écran pour se consacrer à ses enfants. Comme elle l’avoue elle-même, le téléphone ne sonnait plus !
Hollywood n’a jamais vraiment misé sur les vedettes glamoureuses de plus de 40 ans, surtout quand elle sont sujettes au double menton.
Dorothy continuera à chanter sur disque , dans les night clubs et à Londres à nouveau., avant de refaire une apparition fugace (amis remarquée) dans un ultime numéro d’En route vers…Hong Kong (1962), malgré l’opposition de Bing Crosby qui ne la jugeait plus bancable et la présence de Joan Collins dans le principal rôle féminin.
Si à l’occasion, l’actrice accepte un rôle voire même n’importe quoi pour ne pas se faire oublier (l’indigne Pyjama party par exemple), Dorothy chante surtout désormais sur scène (Hello Dolly en 1967). Interrogée sur le cinéma d’aujourd’hui, l’ancien sex symbol se montrait quelque peu aigrie fustigeant « le sexe, la nudité et l’homosexualité à l’écran qui ruinent l‘espoir de la jeunesse» . Elle apparaîtra encore dans des séries télé , ne refusant jamais une interview. Collègue très appréciée de ses pairs pour a bonne humeur , sa simplicité et son humour, Dorothy Lamour nous a quitté en 1994.
Hélas, la Paramount dont elle fut la star la mieux payé à la fin des années 30, n’a jamais vraiment accordé d’intérêt à son catalogue et hormis la série avec Bob Hope, les films de Dorothy Lamour sont difficilement visibles aujourd’hui Nul doute qu’un ressortie en DVD occasionnerait un regain d’intérêt pour cette splendide créature. En tous les cas, on peut toujours écouter sa voix berceuse, ensorcelante sur quelques Cds importés des USA ou d’Angleterre.

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