dimanche 22 février 2009

Irène de Trébert, Mademoiselle Swing






Pendant l’occupation allemande, la musique américaine était interdite en France, et pour résister à leur manière (d’une façon bien futile et inutile diront certains), de nombreux jeunes ont adopté la mode zazou et les rythmes de la musique Swing. La vedette féminine de ce « mouvement » fut Irène de Trébert. Comme en France, nous avons eu très peu de danseuses à claquettes vedettes de cinéma, il est impératif de s’attarder un peu sur l’histoire de Mademoiselle swing.

Irène est née en 1921 sur un paquebot. Après des débuts sans trop d’éclats dans le monde du music hall (un spectacle de danse dès 1931 à l’Olympia, l’enregistrement de comptines pour enfants comme savez vous planter des chous), Irène se rend aux USA dans les années 30 pour faire ses classes dans des spectacles de Broadway.
A son retour en France, elle est engagée par l’orchestre de Raymond Legrand (le père de Michel). Le plus populaire des chefs d’orchestre de variétés, Ray Ventura, d’origine juive, ayant quitté la France pour se réfugier en Amérique du Sud, Raymond Legrand a le champ libre pour devenir le nouveau champion des orchestres de variétés. Les tournées de la formation qui mêle swing, sketchs, chansons comiques et sentimentales remportent un énorme succès. Irène interprète les succès du moment en version swing et syncopée (comme le premier rendez vous de Danielle Darrieux), avec une petite voix légère pas du tout désagréable et danse les claquettes sur les rythmes endiablés. Si les chansons ne sont pas américaines (censure oblige), elles en ont l’air !
En 1942, c’est le tournage de Mlle Swing avec Irène, l’orchestre de Raymond Legrand et Elvire Popesco. Mis à la part les chansons entraînantes, qui eurent un gros succès, il n’y a pas grand chose à sauver dans cette comédie musicale bien insignifiante. Le scénario est nul. Irène est certes sympathique, avec son grand sourire, son air malicieux, sa coquetterie dans l’oeil, et sa façon de parler si particulière. Elle a vraiment quelque chose. Cependant sa personnalité est mal exploitée : elle est plutôt insipide dans les scènes de comédies, et pour la danse, disons qu’elle est correcte. Elle ne risque en tous les cas nullement de faire de l’ombre à Eleanor Powell ou Marika Rökk, la vedette hongroise des comédies musicales allemandes diffusées en masse à cette période. Pourtant le public français, qui a vraiment besoin de se divertir, privé des films de Fred et Ginger, fera un beau succès à cette Mlle Swing.


La naissance d’un bébé dont le père est Raymond Legrand (prénommé Michel-Patrick –curieux quand on sait que Raymond était déjà papa d’un Michel appelé à un avenir brillant) ne ralentit pas les activités d’Irène qui décroche encore un succès avec la guitare à Chiquita. A la libération, Raymond et Irène sont blâmés et interdit de scènes quelques mois, pour avoir chanté devant les allemands et continué allègrement leur carrière pendant l’occupation.
La carrière d’Irène dans la chanson ne s’en remettra pas (d’autant plus que le peu fidèle Raymond Legrand la laisse choir). On la retrouve dans quelques opérettes (avec Bourvil) puis dans des films à petits budgets au début des années 50, comme Duel à Dakar, ou le très mauvais musical Musique en tête (1952) avec Rudy Hirigoyen et l’orchestre de Jacques Hélian (qui a supplanté dans le cœur des français celui de Raymond Legrand).
Par contre, ce coquin d’Anatole (1952) d’Emile Couzinet, qui passait pour un des pires metteurs en scène d’autrefois s’avère une bonne surprise. Certes, c’est du théâtre filmé, il n’y a aucune idée de mise en scène, mais les comédiens, notamment Irène sont fort drôles. Ce n’est pas du raffiné c’est sûr, mais la cible est atteinte : on rit de bon cœur et c’est en tout en cas 30 fois meilleur qu’un navet comme musique en tête. (En plus, Irène y danse, bien, dans 2 courtes séquences)
Irène donne aussi la réplique à Roger Nicolas, chansonnier fort populaire à la radio (« écoute écoute ») dans un dans le roi du bla bla.

Sa carrière s’arrêtera là. Dans les années 70-80, elle donnera des cours de claquettes. Elle était parait il très amère et regrettait certaines erreurs du passé. Elle est décédée en 1996.

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