jeudi 21 mai 2009

Julie London, le top de la séduction





Imaginez une créature de rêve, presque trop belle pour être vraie, pour laquelle le mot glamour aurait pu être inventé, susurrant d’une voix chaude et sensuelle des mélodies romantiques et jazzy…
Oui, cette femme a bien existé, il s’agit de la chanteuse de charme Julie London dont les 33 tours ont fait rêver beaucoup d’auditeurs dans les années 50 et 60, autant pour leur contenant (des pochettes illustrées de magnifiques portraits d’une femme belle à damner un saint), que leur contenu (des ballades à écouter autour de minuit). Evidemment, une aussi belle plante n’a pu échapper à l’industrie cinématographique, et si la ravissante chanteuse n'avait pas été si modeste, elle aurait pu s’enorgueillir d’avoir paru dans quelques très bons westerns et autres films à la fin des années 50.

Née en 1926 en Californie dans une famille d’artiste de vaudeville, la petite Julie suit très tôt ses parents dans les tournées, et chante en public dès l’âge de 3 ans puis dans le show animé à la radio par sa famille. Après des études à l’école professionnelle d’Hollywood, et plusieurs petits jobs (dont celui de liftière dans l’ascenseur d’un hôtel), elle est remarquée par Sue Carol, ex-star du muet devenue agent à Hollywood et épouse d’Alan Ladd : Julie fait ses débuts de comédienne dans Nabonga (1944), un King Kong de série B, à réserver plutôt aux amateurs de second degré.

Après moult photos de pin-up pour les soldats (nous sommes alors en pleine guerre) et quelques petits rôles dans divers films de seconde zone (notamment un musical avec Jack Oakie) ou de la figuration dans des films à gros budgets (Broadway en folie avec Betty Grable), elle paraît dans un ou deux bons polars (la maison rouge ressorti en DVD) et déjà des westerns comme le cavalier masqué avec le chanteur Gordon Mac Rae (pourtant ni l’un ni l’autre ne fredonne le moindre refrain dans le film), avant de quitter les studios de cinéma pour épouser l’acteur Jack Webb (connu alors pour ses rôles à la radio) et élever leurs 2 filles.
Après leur divorce en 1954, l’artiste, encouragée par le musicien Bobby Troup, décide de se recentrer plutôt sur sa carrière de chanteuse et fait mouche en enregistrant l’album Julie is her name, une collection de ballades murmurées d’une voix sensuelle, comme un soupir, avec tout juste deux guitares en accompagnement.

Le disque remporte un gros succès (3 millions de copies), notamment la chanson cry me a river, qui deviendra un vrai standard et connaîtra moult reprises (Shirley Bassey, Mari Wilson, Annie Fratellini, Ella Fitzgerald, Joe Cocker, Viktor Lazlo, Diana Krall, Justin Timberlake et ce n’est pas fini…). Je ne surprendrai personne en affirmant que rien ne vaut l’original.
Dans l’amusant musical de Frank Tashlin, la blonde et moi (1956), la belle Julie chante son fameux tube dans une séquence très réussie où Tom Ewell, ivre, croit l’apercevoir à chaque coin de la maison, toujours plus sexy et glamoureuse comme sur ses pochettes de disques. (L’idée sera reprise dans le clip de la reprise assurée par Viktor Lazlo dans les années 80).

Nominée 3 années de suite chanteuse de l’année, Julie profite de se succès discographique et médiatique pour reprendre le chemin des studios : mais dans des films de série A désormais : le plus souvent des westerns et pas des moindres (les dernières grandes années du genre) : l’homme de l’ouest d’Anthony Mann (1958) avec Gary Cooper, sorte de huis clos shakespearien, prenant et angoissant, (la fameuse scène où Julie est contrainte d’effectuer un strip-tease (innocent) sous la menace d’un revolver a frappé les imaginations) ; libre comme le vent de John Sturges, encore un très beau film où deux hommes se disputent les faveurs de l’envoutante Julie (elle interprète aussi la fort belle chanson du générique) ; l’aventurier du Rio grande (1959 de Robert Parrish avec Robert Mitchum) encore un western magnifique mélangeant habilement l'action, la romance et l'aventure.

A la même époque, on a vu Julie dans des drames moins marquants comme le dernier damier (1959 avec le chanteur Nat King Cole), un drame un peu lourdingue sur le racisme, où l’actrice s’en sort encore avec les honneurs. Celle qui déclarait ne pas être Sarah Bernhardt n’était pas qu’une présence ensorcelante d’une beauté à couper le souffle, mais une actrice, certes passive mais tout à fait convaincante.

Elle joue le rôle d’une chanteuse de cabaret dans Allo l’assassin vous parle (1960) et dompteur de femmes (biopic sur George Raft), qui comprend pas mal de bons numéros musicaux.

Durant toutes les années 60, Julie va poursuivre l’enregistrement d’une série de 33T aux titres évocateurs (your number please, make love to me…) qui feront les délices des amateurs d’easy listening et de jazz vocal. Qu’elle soit entourée d’une grande formation, tout cuivres dehors (comme pour Daddy composée par son nouveau mari Bobby Troup), du minimum comme pour blue moon, qu’elle chante la bossa nova (girl from Ipanema), des airs exotiques (besame mucho, sway, reprise 50 ans après par Diam’s : laisse moi kiffer), des chansons de films (comme hello Dolly, Harlow, the days of wine and roses, moon river, l’ombre sous la mer), ses interprétations sont toujours excellentes et je ne saurais quel titre conseiller à qui voudrait la découvrir (sa version hyper sensuelle de round midnight peut-être, ou de « danser sur moi » du film Harlow, reprise chez nous par Nougaro, ou encore le délicieux nice girls don’t stay for breakfast).

Loin d’avoir la grosse tête, la chanteuse très introvertie semblait méconnaître son propre talent : « je n’ai qu’un filet de voix, c’est pourquoi je chante tout près du micro », « ma voix est rauque car je fume trop », « on a passé plus de temps sur la réalisation des pochettes que sur les chansons » (au sujet des splendides couvertures de ses disques dont le célèbre calender girl, où elle joue les pin up dévêtues pour tous les mois de l’année, avec une chanson pour chaque mois) ;

A lire ses déclarations lors des interviews, on peut se demander si la chanteuse n’avait réellement aucune confiance en elle ni aucune estime pour ce qu’elle faisait, où s’il s’agissait d’une hyper sensible qui se dévalorisait elle-même pour couper l’herbe sous le pied à un journaliste qui aurait pu la critiquer.
Dans les années 60, Julie apparaît en guest star dans de nombreuses séries télé comme les espions avec Bill Cosby ou la grande vallée. Elle enregistre son dernier album en 1968, juste avant que sa firme de disque liberty ne fasse faillite. Le concept du disque (la reprise de chansons rock du moment des Doors, les Beatles en version easy-listening) est trop en avance : les critiques pleuvent.

En 1972, l’ex-mari de Julie, Jack Webb lui propose un rôle d’infirmière le soap opéra « emergency » : un gros succès dans un programme probablement pas terrible (où l'actrice à 45 ans présente une étonnante ressemblance avec Sue Ellen de Dallas): c’est triste mais aux USA, il semble que les gens se souviennent plus de sa prestation dans ce feuilleton à l’eau de rose que du reste de sa carrière.
Victime d’une crise cardiaque en 1995, les dernières années de la chanteuse seront très pénibles : elle nous a quittés en 2000. Mais sa voix sensuelle, son répertoire intimiste et son image ultra glamour n’ont pas fini de faire rêver.

3 commentaires:

  1. Ah, cette chère Julie... ! Je la trouve tellement glam' que j'ai acheté certains de ses albums (33T) sans les écouter avant, juste pour avoir le loisir de contempler les pochettes, des sommets du genre.

    RépondreSupprimer
  2. PS: Celle que je préfère est "London By Night".

    RépondreSupprimer
  3. je me souviens, à sa mort: 3 lignes dans Ciné Revue....

    RépondreSupprimer