mercredi 11 novembre 2009

Mona Goya, l'optimisme incarné







Pimpante et gaie, la blonde Mona Goya a promené son personnage naturel de bonne vivante dans un nombre important de comédies souvent musicales du cinéma français des années 30. « Vedette moyenne d’un cinéma moyen » pour reprendre la plume assassine d’un critique indélicat, la fantaisiste n’a certes pas toujours fait preuve de beaucoup de discernement dans le choix de ses rôles. Il semble même qu’elle ne refusait aucun projet qu’on lui présentait. Mais le public populaire d’avant guerre savait que sa présence sur une affiche garantissait bonne humeur et drôlerie et c’était l’essentiel.
Née en 1909 à Mexico de parents français, Mona Goya a très tôt manifesté l’envie de faire du music hall. Encouragée par sa maman, la jeune fille démarche les studios de cinéma avec une série de photos sous le bras. Germaine Dulac, l’ambitieuse célèbre réalisatrice avant-gardiste la remarque et lui confie un petit rôle dans l’oubliée « rêve cinématographique « sur la vie d’un ouvrier victime du cinéma! Mona Goya parait l’année suivante dans l’argent, le chef d’œuvre de Marcel Lherbier avant de trouver enfin un premier rôle dans l’effet d’un rayon de soleil, étonnante et fort drôle première œuvre de Jean Gourguet, dans le sillage de René Clair.
Néanmoins compte tenu des aléas traversés par l’industrie cinématographique française à l’orée du parlant, la jeune comédienne se retrouve sans emploi et réduite à faire de la réclame pour des boîtes de conserve. Tentant le tout pour le tout, elle s’exile ensuite en Angleterre afin de solliciter un rendez-vous avec les studios Elstree qui lui confient un rôle dans the lady from. the sea avec le futur Ray Milland.
Avec l’avènement du cinéma sonore, les studios hollywoodiens sont en quête de comédiens maîtrisant les langues étrangères pour jouer dans les adaptations de films américains destinés aux publics étrangers. En effet, la technique du doublage n’était pas encore utilisée et les grands studios , qui ne tenaient pas à perdre le marché lucratif européen n’hésitaient pas à mettre en chantier des versions multiples. Une aubaine pour une jeune actrice polyglotte en devenir comme Mona Goya.
On la retrouve ainsi à Hollywood au générique des versions françaises de Jenny Lind (dont la vedette est Grace Moore) et de Soyons gais (où elle reprend le rôle de Sally Eilers). De cette époque bénie, Mona Goya conservera le souvenir des week-end passés avec le couple Feyder/ Françoise Rosay , bouée de secours des français expatriés. La solitaire Garbo était d’ailleurs une invitée fréquente des fêtes organisées par les deux artistes.
Parmi les films de cette période américaine, Révolte dans la prison (1930) du grand Paul Fejos est probablement le meilleur et en tous cas le plus populaire (aussi bien dans ses versions anglaises que françaises). Le principe des films en multi versions va vite être abandonné pour des raisons économiques, grâce procédé du doublage (qui au départ provoquera quelques réticences : les dialogues étaient traduits tels quels, et ne correspondaient plus aux mouvements des lèvres des acteurs). En outre, il faut tout simplement reconnaître que le public français et étranger avait envie de revoir les vedettes américaines et pas des artistes de 2ème catégorie en train de les imiter. En tout état de cause, Mona Goya avait eu le temps de se faire un nom, et à son retour en France, ne sut où donner de la tête ; on la retrouve ainsi au générique de la bande à Bouboule, comédie marrante avec le très populaire Milton ou des comédies musicales comme les époux célibataire de Jean Boyer, le réalisateur français le plus prolixe dans ce genre spécifique avec le très bon chanteur Fred Pizzela, trop tôt disparu. Après les versions françaises de films américains, Mona se frotte aussi à une adaptation d’un film allemand , le musical Cavalerie légère (1935), adaptation elle reprend le rôle de Marika Rökk, vedette hongroise partageant la même image optimiste et joyeuse. Elle épouser son partenaire du film, le très oublié Fernand Fabre.
On se souvient surtout de ses apparitions aux cotés de Fernandel et notamment de l’hilarant François Ier (elle incarne la belle ferronnière) et de la fameuse scène de la chèvre qui a fait les belles heures de la séquence du spectateur.
En 1939, Mona Goya remporte un beau succès dans Feux de joie, un des meilleurs films de l’orchestre de Ray Ventura dont est tirée le célèbre ça vaut mieux que d‘attraper la scarlatine. Comme un dernier pied de nez avant un cataclysme, elle pose en maillot de bain , en imitant Hitler dans le dernier numéro de Cinémonde paru juste avant la débâcle.
Pendant l’occupation, la vedette reste très active. Tout en paraissant dans des comédies peu ambitieuses, l’artiste tente de diversifier ses activités en s’essayant au tour de chant dans le cabaret de Suzy Solidor puis les plus grands music hall de l’époque comme l’ABC ou Bobino. Curieusement, elle préfère le genre réaliste aux gaudrioles et se consacre avec opiniâtreté à son nouveau job en prenant des cours de chant. Ses enregistrements (la chanson du film caprices ou de l’aventure est au coin de la rue) révèlent d’ailleurs une voix juste et bien timbrée mais assez impersonnelle. Edith Piaf qui apprécie beaucoup sa fantaisie et son sens de la fête lui confiera certaines chansons. A son répertoire figurait aussi Yes Sir le tube de Zarah Leander, si populaire pendant cette sombre période.
Alors qu’elle est toujours l’épouse de Fernand Fabre, Mona Goya va vivre une courte liaison avec Sacha Guitry, séduit par sa verve et son franc parler qui n’hésite pas à s’afficher lors des premières avec sa femme et sa maîtresse. D’ailleurs, il les met toutes les deux en scène dans Donne moi tes yeux (1943), un film calqué sur les démêlés conjugaux du fameux dramaturge (un sculpteur fait semblant d‘être épris d‘une chanteuse pour rendre sa femme jalouse)
dans lequel Mona case également une chanson.
Après guerre, Mona Goya continue de paraître dans diverses comédies populaires, notamment aux cotés de Bourvil, mais dans des rôles de moindre importance.
Au théâtre, elle triomphe en revanche dans Clérembard de Marcel Aymé, où son personnage de la langouste, prostituée haute en couleurs lui vaut les meilleurs critiques de sa carrière.
Luttant depuis des années contre un cancer, et prématurément vieillie, Mona Goya n’est plus la vamp d’autrefois et peine à poursuivre sa carrière à la fin des années 50. Sa vieille amie Edith Piaf n’oublie pas de lui réserver un rôle pour son dernier film les amants de demain (1958). C’est à peine si on la reconnaît dans les vieux de la vielle (un classique de Gilles Grangier qui autrefois repassait sans arrêt à la télévision) où elle donne la réplique à Jean Gabin, son acteur favori, tant sa silhouette est alourdie et ses traits fatigués.
Mona Goya nous a quitté en 1961 à 52 ans seulement. La médiocrité de la plupart de ses films et aussi le fait que certains soient totalement invisibles depuis des lustres (je pense notamment aux versions françaises des films américains, jamais rediffusées ….et s’il y avait des pépites cachées?) expliquent pourquoi la comédienne est fort peu connue des moins de 60 ans. Dommage.

2 commentaires:

  1. Merci
    http://www.edith-piaf.narod.ru/

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  2. Elle est formidable d'abattage dans un rôle bref mais complet, celui de la femme qui voit d'éloigner son gigolo, dans "Gibier de potence" de Roger Richebé – un film absolument à redécouvrir avec Georges Marchal, Arletty et Nicole Courcel.

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