vendredi 20 février 2009

Sharmila Tagore, du film d'auteur aux paillettes de Bollywood



Quand on pense au cinéma indien, deux images viennent à l’esprit : d’une part les superbes films poétiques, réalistes et dépouillés de Satyajit Ray, d’un autre coté les productions « bollywoodiennes » ultra kitch à l’eau de rose, bourrées de chansons et de danses.
La très belle Sharmila Tagore s’est illustrée dans ces deux genres contradictoires.


Née en 1946, elle débute très jeune à l’écran chez l’un des plus grands maîtres du cinéma mondial : Satyajit Ray. Son rôle dans le monde d’Apu n’est pas très important, mais elle l’interprète avec étonnamment de maturité. Sa grâce est indéniable. Dès l’année suivante, elle se voit confier par le même réalisateur le rôle de la supposée réincarnation de la deesse Khali dans la déesse (1960). Elle s’y révèle excellente.
Sans doute désireuse d’étendre son public (les films de Ray, très appréciés chez nous, n’ont jamais été d’énormes succès au Box office en Inde, et leur langue (bengali) les confinait à un public restreint), Sharmila accepte les propositions des studios de Bombay : dans Kashmir Ki Kali, la voici fleuriste face à Shammi Kapoor, que l’on surnomme le « Elvis Presley » indien…un Elvis qui aurait un peu abusé des goulab jamouns !
Evidemment, ça danse et ça chante et tous les acteurs sont doublés pour le chant, dans la grande tradition indienne (Asia Bhosle chante à la place de Sharmila). Le succès phénomènal du film, vaudra à la jolie Sharmila d’enchaîner d’autres films musicaux, souvent avec Shammi.
An evening in Paris (1967) , notamment vaut le détour pour les amateurs d’insolite. C’est kitsch à souhait : l’action se situe à Paris, un Shammi bedonnant chante en gesticulant à outrance dans un hélicoptère, tandis que Sharmila, princesse voyageant incognito, donne un show vêtue d’une sorte de bikini à paillettes qui fera scandale chez les intégristes musulmans et indous. Ceux-ci s’émeuvent de la voir à la même époque poser en bikini ou en jeans sur des revues de mode. A cela, Sharmila répliquera qu’elle s’habille naturellement comme elle le sent et qu’elle ne cherche nullement la provocation.Si aujourd’hui, beaucoup de films musicaux bollywoodiens, avec SHARRUKH KHAN ou Hrithik Roshan notamment, éblouissent par la grandeur de leurs numéros musicaux, an evening in Paris reste une vraie pacotille!


Fort curieusement, Sharmila va continuer à alterner ces films très commerciaux (invariablement musicaux), avec d’autres réalisations de Ray et de réalisateurs aux antipodes du système bollywoodien !
En 1969 , elle obtient un véritable triomphe dans le mélo musical Aradhana (de S. Samanta), un remake d'un film hollywoodien qui valut un oscar à Olivia de Haviland, aux cotés de Rajesh Khanna, jeune premier romantique au jeu sensible. Ce dernier devient du jour au lendemain (mais pour peu de temps) la coqueluche des jeunes indiennes et provoque de véritables scènes d’hystérie telles qu’aucun acteur indien, pas même Dilip Kumar, n’en avait causé. Du coup, il enchaîne les films avec Sharmila, mais celle-ci est réduite à un rôle de faire valoir. En 1968, Sharmila épouse le richissime Nabab de Pataudi , champion de cricket surnommé le Tigre, et chasseur d’antilopes en voie de disparition à ses heures perdues . Leur mariage fait la une des journaux. Elle aura 3 enfants dont Saif Ali Khan et Soha Ali Khan, stars du cinéma bollywoodien actuel.


Dans les années 70, l’étoile de Sharmila se ternit un peu. Après avoir brillamment interprété le rôle d’une prostituée dans Mausam (1975), elle joue plusieurs fois aux cotés d’Amitabh Bachchan, le nouveau roi du cinéma bollywoodien (statut qu’il conserve toujours 30 ans après), mais le couple qu’elle forme avec la nouvelle idole attire moins les spectateurs que ses films avec Rajesh Khanna.
En 1983, dans Doosari Dulhan, Sharmila interprète le rôle d’une femme stérile qui cherche une mère porteuse et à recours à une prostituée (curieux thème récurrent dans la production indienne, repris dans le plus récent et très populaire chori chori chupke chupke).

Dans les années 1990, Sharmila Tagore ralentit ses activités de comédienne alors que son fils Saif Ali Khan se lance à son tour dans le monde du cinéma. Après des débuts guère prometteurs, ce dernier est devenu depuis 5 ou 6 ans l’un des comédiens les plus aimés et les plus talentueux de Bollywood. Très versatile (comme sa maman), il alterne les comédies (salaam namaste), les thrillers ou les films d’auteur (being Cyrus), en incarnant tantôt les héros gaffeurs et attachants ou les pires salauds sans peur d’écorner son image.
En 1999, Sharmila fait un come-back raté, dans un rôle de grand-mère, dans le nullissime Mann, remake bollywoodien d’ « Elle et lui ».
On retiendra de ce film la désopilante (mais était ce volontaire ?) reprise en hindi de l’italiano de Toto Cutugno par Aamir Khan.
L’an dernier, elle a fait meilleure impression dans Virudh avec son ancien partenaire Amitabh Bachchan.
Sharmila va le retrouver cette année dans Eklavya, où pour la première fois, elle jouera avec son fils Saif Ali Khan. Une bonne nouvelle pour les fans

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