samedi 30 mai 2009

Lizzi Waldmüller, piquante vedette des opérettes viennoises





Pendant la guerre, le public allemand avait besoin d’évasion et de divertissement. Nombreuses opérettes filmées furent ainsi mises en chantier pour distraire les spectateurs qui le temps de quelques roucoulades pouvait ainsi s’échapper de leur sombre quotidien. La piquante brunette Lizzi Waldmüller fut la vedette principale de ces viennoiseries légères : des films, souvent très datés sont enfouis dans les mémoires, mais qui ne déplairaient pas aux amateurs du genre.
Née en 1901, Lizzi Wald Müller toujours baigné dans le monde du spectacle : sa mère était chanteuse et son père, directeur d’une compagnie théâtrale. Aussi la gamine débutera très tôt sur les scènes viennoises. Après avoir pris des cours de chant, la jeune artiste joue les soubrettes dans de nombreuses opérettes à Innsbruck, Vienne et Berlin.
Elle obtient notamment un succès notable dans l’opérette de Paul Abraham « Viktoria et son hussard », qui sera porté à l’écran en 1932 puis 1954. A l’arrivée du cinéma parlant, les producteurs sont plus que jamais à l’affût des jolies artistes des scènes théâtrales. Lizzi est engagée comme vedette de « la mouche espagnole », une farce mise en scène par Georg Jacoby, un vieux routier du muet plus connus pour ses films ultérieurs avec Marika Rökk. Néanmoins, ni ce film ni les suivants (dont lachenden erben de Max Ophuls une comédie bien enlevée mais totalement étrangère à l’univers de ce cinéaste) ne vont permette à la chanteuse de s’imposer. Un peu déconfite, Lizzi préfère se tourner vers la chaleur des applaudissements : elle rencontre et épouse Max Hansen célèbre cabarettiste à l’humour coriace, créateur à la scène du rôle principal de l’auberge du cheval blanc. L’artiste juif, attaqué par les nazis (qui lui avaient lancé des tomates lors d’un spectacle), est contraint de quitter l’Allemagne pour l’Autriche puis la Suède (ensemble ils tourneront un film là bas en 1936).
Après leur séparation, l’actrice revient en Allemagne où elle doit repartir à zéro : Willi Forst, probablement le plus talentueux confectionneur de viennoiseries filmées, l’engage pour un court rôle de soubrette dans l’adaptation de Bel ami de Maupassant. Dans le petit rôle d’une ex du fameux séducteur, Lizzi n’a pas beaucoup de scènes mais une chanson magique , l’entraînante « bel ami » qui remporte un triomphe aussi bien en Allemagne que chez nous (par Tino Rossi et Eva Busch).
Portée par cette mélodie triomphale, Lizzi devient enfin à près de 40 ans une grande vedette du film musical et va tourner sans discontinuer jusqu’à la fin de la guerre.
Parmi ses apparitions les plus remarquées, musique de rêve, un film revue avec le célèbre chanteur d’opéra Benjamino Gigli. Dans un passage très inspiré de Busby Berkeley (et copié plus tard par Ken Russell dans th boy friend), Lizzi monte sur un gramophone géant et danse sur un disque 78 tours tandis que les silhouettes des girls se reflètent sur les murs. Comme souvent dans les films allemands de l’époque, les décors sont hideux mais les chansons de 1er ordre. Lizzi tourne également dans la version italienne de ce film où Rossano Brazzi tient le rôle principal.
Dans une nuit à Venise qui reprend les motifs d’une fameuse opérette de Strauss, Lizzi donne la réplique à Heidemarie Hatheyer, actrice dramatique fort talentueuse.
La comédienne viennoise remporte son plus grand succès dans folies nocturnes (1941) , opérette de la fin du 19ème siècle, une pièce montée plutôt réussie si on se réfère aux critiques (très contrôlées) de l’époque. Elle y livre un très emballant « berliner luft" qui sera repris par Zarah Leander et même plus récemment par des patineurs allemands pour accompagner leur prestation.
La voix et l’entrain de Lizzi sont bien utilisés dans Es leben die liebe, musical de bon aloi, avec Johannes esters le « grand seigneur du film viennois ». Les mélodies romantiques sont superbes et placent cette opérette parmi les meilleures de cette sombre époque.
Réputée pour ses qualités de cuisinière, la vedette était connue pour mitonner pour ses collègues des bons petits plats dans ses chambres d’hôtels avec des produits achetés au marché noir. En pleine alerte à la bombe, pendant les bombardements viennois d‘avril 1945, la star se hasardera à quitter sa cave pour faire la cuisine. Elle sera tuée instantanément par une explosion. Compte tenu des circonstances tragiques, son compagnon, l’acteur du muet Egon Von Jordan sera obligé de l’enterrer lui même dans un bois voisin en recouvrant son corps de papiers d’emballage.
Une triste fin pour une artiste si souriante à la voix radieuse, fantôme d’un cinéma endormi sous les décombres.

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