dimanche 15 février 2009

Ann Miller, un tourbillon de claquettes










Tourbillonnante et virevoltante, sans jamais se déparer d'un sourire inoxydable, Ann Miller, a ébloui les amateurs de films musicaux par son entrain et son agilité dans quelques grands classiques de la MGM, sans jamais avoir la chance de tenir le rôle principal.

Née en 1923 au Texas, Ann Miller a pris très tôt des leçons de danse, sur la recommandation expresse du médecin de famille car elle souffrait de rachitisme. Après le divorce de ses parents (son père était avocat, et aurait défendu une affaire concernant Bonny et Clyde), la gamine est obligée très jeune de travailler afin de subvenir aux besoins de sa mère. En falsifiant son âge (d’où une certaine confusion sur sa véritable date de naissance), elle obtient de petits jobs de danseuse dans des cabarets, puis grâce à l’intervention de Lucille Ball, dans des comédies musicales de série B voire Z. Rien de remarquables dans ces films produits par la RKO (New faces of 1937, Radio city revels…), parfois sauvés par d’agréables musiques, où Ann, qui ressemble à une fille un peu mal grandie danse tantôt sur les pointes, tantôt les claquettes.Très active, Ann va ainsi paraître dans un nombre considérable de films à petits budgets, y compris un western musical produit par le studio Republic, l’un des moins prestigieux d’Hollywood (elle tient aussi un petit rôle dans le célèbre film de Capra « Vous ne l’emporterez pas avec vous »).

Dans les années 40, elle signe un contrat avec la Colombia et petit à petit se fraye un chemin vers la célébrité. En 1946, Harry Cohn, le patron si décrié de ce studio, envisage même de lui confier un grand rôle dans un musical prestigieux en technicolor, pour punir la principale vedette de la maison, Rita Hayworth avec laquelle il est fâché. Manque de chance, le millionnaire qu’elle vient d’épouser souhaite qu’elle abandonne son métier. Ann devra payer une forte indemnité pour cette rupture de contrat. Après la perte du bébé qu’elle attendait, suite à une chute dans les escaliers, lors d’une dispute avec son mari, Ann divorce et décide de reprendre du service.

Engagée par la MGM, en tant que guest-star, pour un seul numéro, une danse gitane avec Ricardo Montalban et Cyd Charisse, dans le pitoyable « Brigand amoureux »1948 (un film qui ne vaut que pour ce numéro remarquable), elle se révèle si brillante que Louis B Mayer lui fait signer un contrat de 7 ans. Précisons aussi, que le fameux Mogul était amoureux d’elle et voulait même l’épouser. Finalement, Ann refusera le mariage et c’est peut-être la raison pour laquelle elle sera toujours confinée à des rôles secondaires. Mais après tout qu’importe si Kathryn Grayson, Jane Powell ou Esther Williams sont les vedettes : c’est souvent les numéros d’Ann qui marqueront les esprits !Avec 10 années d’expérience acquises dans les petits studios et les séries b, Ann Miller n’a cessé de progresser : sa grâce, sa vivacité sont remarquables, particulièrement dans le domaine des claquettes (elle était capable de faire 500 claquettes à la minute, un record !), et elle demeure (avec Eleanor Powell) la plus brillante tap danseuse de toute l’histoire du cinéma.

Parmi ses fabuleuses prestations : son numéro de claquettes sur « shaking the blues away » dans Parade de Printemps (1948) (rôle prévu à l’origine pour Cyd Charisse), ou le superbe numéro du « Joyeux prisonnier »1953, dans un décor d’instruments de musique sorti de l’imagination fertile de Busby Berkeley. Tourbillonnante et survoltée, elle a certainement signé quelques unes des plus belles pages du film musical hollywoodien. Le fait qu’elle interprète toujours des chipies mondaines, un peu excentriques, la rend également plus intéressante que les ingénues un peu nunuches du cinéma d’alors.Le déclin du film musical met un terme à sa carrière. Remariée à un autre millionnaire, et friande de mondanités, elle ne loupe aucune soirée, première ou ouverture de nouveaux cabarets (ce qui fit dire à sa copine Betty Grable qu’elle ne raterait même pas l’ouverture d’une enveloppe). Dans les années 70 et 80, après une longue inactivité, elle tente sa chance à Broadway dans des reprises de Mame, ou dans Suger Babies avec Mickey Rooney : son talent de danseuse demeuré intact (remarquons qu’elle savait également chanter, alors que la plupart des autres danseuse d’Hollywood étaient doublées pour le chant) lui vaudra de nombreux triomphes sur les planches. A la fin de sa vie, elle eut aussi le privilège de tourner dans Mulholland Drive de David Lynch, où sa prestation fut remarquée. Un autre souvenir, plus triste : je me souviens d'une projection de "That's entertainment III" au quartier latin ou le public poussa un gros soupir de désappointement quand il la vit, vieillie et le visage déformé par les liftings, commenter la séance de "Parade de printemps" où elle était si belle, 50 ans avant...Ann Miller est décédée en 2004 d’un cancer des poumons.



Ann Miller dans le Joyeux prisonnier (1953) :

3 commentaires:

  1. Chacune de ses apparitions, de ses éblouissantes prouesses, rayonne au firmament du charme et de la sensualité. Personne n'a mieux fait en matière de claquettes. Elle reste avec Eleanor Powell l'incontestable reine. Comme il est étonnant de songer que Ann, en pleine période d'Amérique puritaine, fut par la chaleur de sa danse, sa piquante aisance, bien plus désirable et fascinante que toutes les minettes dévêtues et vulgaires d'aujourd'hui...

    Christian Souque

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  2. En 2000, Ann Miller m'avait envoyé une photo dédicacée que je garde précieusement.
    Une artiste très respectueuse de son public.

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  3. Ahhh,la meilleure tap-dancer du monde.Quel est votre numero musical preferé?Je prefere "It".

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