vendredi 3 avril 2009

Dolores Gray, pétulante et sexy





Quand on voit le superbe numéro « Thanks a lot but no thanks » chanté à pleine voix par la pétulante et sexy Dolores Gray dans « Beau fixe sur New York» de Gene Kelly et Stanley Donen, qui d’un coup de levier envoie dans les sous sols les boys qui dansent à ses cotés, on se demande pourquoi avec autant de présence et de voix, cette blonde dynamite au visage un peu chevalin n’a pas fait plus d’étincelles sur les écrans américains…
Hélas, dans le show business, il faut savoir être là au bon moment et au bon endroit, hors Dolores Gray a fait ses débuts à la MGM, alors que la comédie musicale brillait de ses derniers feux et n’a pu faire valoir ses talents que dans 4 films en tout et pour tout !
A Broadway, elle n’a pas été vraiment mieux lotie, car aucune des pièces qu’elle a créé n’a remporté un succès durable, et elle a du se contenter de reprendre sur scène des rôles de musicals à jamais attachés au nom de leurs illustres créatrices Ethel Merman ou Mary Martin.

Née en 1924 à Chicago, Dolores grandit dans un quartier sordide. Elle reçoit un jour une balle perdue lors d’un règlement de comptes entre gangsters et gardera toute sa vie des éclats de balle dans un de ses poumons.
A 15 ans, la jeune femme tente sa chance à Broadway. Sa voix grave et son excellente diction ne laissent pas indifférents. Elle est repérée par Mary Martin, qui vient de triompher dans un musical de Cole Porter. La star prend la gamine sous son aile, lui donne des cours de danse et de chant, la relooke, lui conseille de perdre du poids et de se teindre en blonde. Peu après, Rudy Vallée (un des tout premiers crooners et Don Juan devant l’éternel : il a aussi lancé et aimé Alice Faye) lui propose de chanter dans son show à la radio. Outre quelques tours de chant dans des casinos, Dolores fait de la figuration dans quelques films et chante dans un bref passage de « Femme aimée est toujours jolie » avec Bette Davis.

Après guerre, elle joue dans plusieurs spectacles de Broadway (dont seven lively arts de Cole Porter) mais aucun ne marquera les esprits. En 1947, encouragée par Mary martin, elle accepte de reprendre à Londres le rôle d’Annie reine du cirque d’Irving Berlin avec lequel Ethel Merman a fait un tabac à Broadway : et c’est le triomphe. Elle restera en Angleterre jusqu’en 1951 (cette même année, elle est l’hôtesse d’un court métrage dans lequel on la voit présenter divers chanteurs français comme Edith Piaf).

Les quelques disques qu’elle enregistre à son retour aux States n’ont hélas rien d’exceptionnel, et on n’y trouve pas encore la flamme de ses futures vocalises dans sa poignée de films hollywoodiens. Sa version du sautillant « Shrimp boats » est bien inférieure à celle de Jo Stafford par exemple.
En 1954, Dolores remporte un prix pour sa prestation dans le musical « Carnival in Flanders » dont on ne retiendra que la superbe et mélancolique « here ‘s that rainy day » que de nombreux jazzmen mettront à leur répertoire.

C’est alors que Dolores entre à la MGM, et dans l’unité Arthur Freed plus précisément, celle qui est à l’origine des films musicaux les plus connus et les plus aimés du public.
Analyse amère et cynique, des retrouvailles d’anciens copains de régiment qui n’ont plus rien en commun doublée d’une féroce critique de la télévision, Beau fixe sur New York (1955) est à ranger parmi les meilleures comédies musicales. Dans son rôle de speakerine au large sourire aussi faux qu’interessé, Dolores est particulièrement brillante, et son numéro, entouré de boys, compte parmi les meilleurs du film.

Basé sur de superbes musiques de Borodine (dont l’une fut reprise avec grand succès en France par Gloria Lasso), l’Etranger au paradis est une décevante et statique adaptation d’un musical de Broadway. Le film est bien lourd et Minnelli n’arrive pas à le faire décoller, malgré des chansons sublimes
Quelques moments de grâce : Dolores est en tous cas magnifique dans son rôle de la troublante Lalume et sa voix profonde de contralto jette un sort aux quelques magnifiques chansons qui lui sont confiées (notamment loukoum avec Howard Keel, parfait lui aussi).
Le sexe opposé (1956), pâle remake de Femmes n’a pas la subtilité du film de Cukor. Les correctes prestations des diverses actrices ne risquent pas néanmoins d’éclipser les stars de la première version. Sur un plan musical, c’est plutôt la déception (mis à part un joli numéro de June Alyson) et la voix éclatante de Dolores résonne seulement pendant le générique.

Il faudrait que je revois la femme modèle (1957), comédie non musicale de Minnelli (même si Dolores a un court numéro) tant cette comédie pourtant louée par les critiques m’avait laissé de glace quand je l’avais visionnée il y a une vingtaine d’années. Je me souviens pourtant bien de la scène des spaghettis !
Comme les autres chanteurs et danseurs du studio, Dolores est ensuite virée de la MGM qui ne mise plus sur la comédie musicale.(l’actrice regrette rétrospectivement de ne pas avoir davantage tourné afin de garder ses prestations pour la postérité). Elle enregistre un curieux 33 T uniquement composé de chansons susurrées (dans le style qui a fait la gloire de Julie London), ce qui tranche vraiment avec son style habituel. De retour sur les planches, elle joue dans une opérette basée sur un vieux succès de Marlène Dietrich « Destry rides again » qui lui vaut d’excellentes critiques mais dont le succès sera mitigé.

A la télévision, Dolores anime son propre show où elle fredonne les succès de Cole Porter, Irving Berlin et Gershwin. Les meilleurs extraits sont ressortis en DVD. Quelle idée stupide que les avoir (si mal) colorisés !
Dans les années 60 et 70, Dolores se produit encore dans diverses opérettes, sporadiquement, avec toujours le même succès lors de ses passages en Grande Bretagne. Celle qui pouvait donner sur scène et à l’écran l’image d’une vamp tapageuse était une fervente catholique, très pieuse. Aussi, malgré l’échec de son unique mariage et la séparation du couple, elle refusera toujours de divorcer.
Suite à une attaque, elle décède en 2002.

On ne pourra que regretter la trop courte carrière de Dolores au cinéma. Néanmoins, elle que plusieurs considèrent comme la meilleure chanteuse de Broadway, a vraiment donné le meilleur d’elle-même dans ses rares films dont l’étranger au paradis disponible en coffret DVD.



8 commentaires:

  1. "Thanks A Lot But no Thanks" by Dolores Gray is without a doubt the sexiest femme-fatale musical performance ever. I'm still amazed by why it is not more popular.

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  2. The website Dieforher is about female superiority. It has an interesting piece about Dolores Gray's performance in "It's Always Fair Weather" where she cheerfully kills off a band of dancing suitors with her sexy, heart stopping legs, a gun and dynamite.

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  3. I share your admiration for this geart lady of musicals. And thank's a lot but no thanks is a perfect number and what a voice!

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  4. Ahhh Dolores, sainte patronne des grandes voix et brushing parfait, îcone gay par excellence. Effectivement, pas vraiment au bon endroit au bon moment et souvent dans les souliers d'autres. C'est d'ailleurs elle qui grava sur disque les chansons de Marilyn Monroe dans "There's no business like showbusiness", miss M. étant retenue ailleurs par contrat d'exclusivité. Mais peu importe, une îcone c'est une îcone. Merveilleux blog Music Man,vraiment merveilleux.

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  5. Merci soyons-suave pour tes encouragements. c'est super sympa. Et ça fait toujours plaisir de constater sur divers fora que la grande Miss Dolores Gray compte toujours beaucoup d'admirateurs.

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  6. est-ce qu'elle ne jouie pas maintenant d'une aura qu'elle n'avait peut-être pas de son vivant ? La prochaine sur la liste est Kay Thompson, je crois que je vais m'y coller sur mon blog. Au plaisir de vous y croiser Music Man.

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  7. Oh et juste un dernier mot : La femme modèle de Minnelli est vraiment un film très drôle qui mérite d'être revu.

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