dimanche 7 février 2010

Leslie Caron, Cendrillon d'Hollywood à Paris








Leslie Caron est probablement l’une des stars les plus célèbres de l’âge d’or comédie musicale hollywoodienne, aussi on fut quelque peu surpris d’apprendre qu’on venait de lui attribuer enfin une étoile sur le Walk of Fame d’Hollywood(près de celles de Gene Kelly et de Louis Jourdan), alors que des artistes inconnus ici en possèdent déjà plusieurs…
Enfin , mieux vaut tard que jamais. Aussi étant donné que Leslie Caron vient de sortir son autobiographie aux USA et va se produire dans quelques jours sur la scène du théâtre du Châtelet à Paris dans un musical de Stephen Sondheim, il était également temps qu’un coup de chapeau lui soir rendu sur ce blog dédié aux artistes des films musicaux!

Née en 1932 à Boulogne-Billancourt d’un père pharmacien et d’une maman ballerine d’origine américaine, Leslie a pris très jeune des cours de danse, poussée par une maman incroyablement exigeante et possessive. Son talent est vite remarqué et la très jeune ballerine est engagée dans la troupe de Roland Petit. En 1948, elle remporte un vif succès dans le ballet la rencontre. Parmi les spectateurs enthousiastes figure…Gene Kelly , de passage à Paris. Deux ans plus tard, alors qu’il recherche une remplaçante pour Cyd Charisse, enceinte, pour un américain à paris, Gene se souvient de la jeune française qui vient de faire la une du magazine Paris Match. Après avoir hésité quelques temps entre elle et Odile Versois, Gene laisse le soin aux patrons de la MGM de faire le choix final, et Leslie est retenue . Notons que quelques mois auparavant, elle avait déjà participé à un bout d‘essai pour Juliette ou la clef des songes de Marcel Carné sans être retenue au final, et que Jean Renoir qui l’avait croisée dans un train envisageait également de la faire tourner sous sa direction. Pas mal pour une ballerine qui n’était nullement attirée par le cinéma à l’origine!
Alors qu’elle ne se trouve pas jolie et en tout cas pas du tout photogénique, la petite femme (1 m 56) à la frimousse juvénile, aux grands yeux rêveurs et au large sourire possède un charme inédit très accrocheur. Le succès triomphal du film, dont chacun se remémore l’incroyable ballet final, d’un romantisme absolu, fait de Leslie la coqueluche d’Hollywood.
En 1952, elle campe une jeune fille naïve et simplette fascinée par des marionnettes dans Lilli, un autre gros succès commercial, qui garde une place de choix dans mes souvenirs de jeunes cinéphiles : en le découvrant à la télévision avec ma sœur au début des années 70, nous avions été tellement charmés par ce joli conte, que des pans entiers du films et la jolie ballade nous sont revenus en mémoire lors d’une discussion 20 ans après. J’aurais du en revanche m’abstenir de le revoir, car j’ai été immanquablement déçu par ce film que j’avait un peu trop idéalisé étant gosse!
On imagine difficilement une autre comédienne pouvant jouer avec autant de candeur et se sensibilité que Leslie le personnage de Lilli. En tous les cas, le public américain l’a identifié à Lili au point qu’on l’assaille dans la rue et les magasins pour que « Lili « fasse la bise aux enfants!
Il était donc logique d’engager Leslie pour incarner Cendrillon dans la pantoufle de verre (1955) de Charles Walters, mais hélas le résultat est assez décevant et manque de magie.
Avec Papa longues jambes (1955) Leslie a le grand honneur d’être la partenaire du mythique Fred Astaire et de retrouver le personnage de fraîche jeune fille rêveuse auquel le public l’a identifié. En dépit d’une patente incompatibilité entre les deux artistes, leur numéro dansé lors du bal de promo est très réussi et le charme pétillant de Leslie Caron toujours présent. La chorégraphie était assurée par Roland Petit, à la demande expresse de Leslie.
On est évidemment heureux de la retrouver dans un personnage différent (une prostituée) pour le décevant remake de la valse de l’ombre. Le film manque hélas d’atmosphère et de réalisme.
En 1958, le producteur Arthur Freed propose à Leslie, le rôle de sa vie (refusé par Audrey Hepburn) dans l’adaptation musicale de Gigi, la nouvelle de Colette.
Après avoir montré quelques réticences à travailler avec Minnelli (Leslie aurait préféré Cukor), l’actrice se fond avec bonheur dans ce film somptueux où elle forme un très joli couple avec Louis Jourdan. Couronné de nombreux oscars, c’est peut être le dernier grand film de la grande époque du musical (si l’on omet les adaptations de shows de Broadway) et un triomphe commercial (le soin apporté au doublage des dialogues et chansons à l'étranger y est pour beaucoup). Si certains critiques de cinéma parisiens (notamment dans la revue Image et son)sont peu enthousiastes, ils distinguent néanmoins la prestation de Leslie "qui illumine le film par sa grâce et sa légèreté.
Après Colette, c’est à Marcel Pagnol qu’Hollywood s‘attaque en 1961…. De manière désastreuse si l’on se réfère aux critiques français qui ont fustigé le film avec beaucoup de hargne et la présence aberrante d’Horst Buchholz en Marius. Aux Etats-Unis où les spectateurs disposaient de moins d’éléments de comparaison le film continue d’enchanter un grand nombre de cinéphiles. Depuis ses débuts hollywoodiens, Leslie Caron avait toujours eu la ferme intention de ne pas se focaliser sur la comédie musicale en prenant de nombreux cours de comédie, pour aborder un plus large répertoire. Le déclin de la comédie musicale lui donna l’occasion de briller dans d’autres registres comme the L shaped room, où elle est réellement touchante dans son rôle d’une femme enceinte, sans compagnon (sa remarquable prestation lui vaudra une nomination à l‘oscar). Mais le public qui l’identifie à l’éternelle jeune fille aux yeux écarquillés, a du mal à la suivre.
Si les rôles se font plus rares à l’écran, Leslie fait beaucoup parler d’elle dans la presse du cœur. Sa liaison avec l’infidèle Warren Beatty (son partenaire de la farce Promise her anything) attise la curiosité du public fasciné par la beauté du couple. Très indélicat, l’acteur expliquera à Leslie qu’elle ne peut jouer à ses cotés dans Bonnie and Clyde car elle est trop vieille pour le rôle.
Au milieu des années 70, Leslie Caron fait son retour en France, dont elle apprécie la qualité de vie plus seine et plus équilibrée. Néanmoins, elle a beaucoup de mal à s’y implanter car elle passe ici pour une étrangère et qu’elle ne trouve aucun rôle à sa mesure, ni de rôles qui l’intéressent profondément. On la retrouve ainsi dans l’homme qui aimait les femmes de Truffaut (un réalisateur avec lequel elle avait noué de solides liens amicaux) et le fort médiocre Tous vedettes, une comédie musicale à la française de Michel Lang (le réalisateur d’A nous les petites anglaises) qu’on ne pourrait comparer décemment avec les chefs d’œuvre que Leslie a tourné à Hollywood.
En 1977, elle incarne avec beaucoup d’outrance et de drôlerie Alla Nazimova dans le très décrié Valentino de Ken Russell, film très kitsch qui lui donne encore l’occasion de donner la réplique à un danseur légendaire : Rudolf Noureev!
Afin de toucher le plus large public, Leslie Caron ne dédaigne pas non plus la télévision :
Je me souviens bien de Dr Erika Werner, feuilleton français des années 70 adapté d’un roman de Konsalik…dont je n’ai jamais vu le dernier épisode…pour cause de vacances familiales (ressortira-t-il un jour en DVD?).
Au creux de la vague, elle se tourne vers l’écriture de scénarios (mais par manque de courage, elle a renoncé à aller plus loin) et de nouvelles (vengeance)
Au début des années 90, Leslie ouvre un petit hôtel en Bourgogne (à Villeneuve sur Yonne plus précisément ) « la lucarne aux chouettes« , qui hélas a fermé ses portes en automne dernier, victime de la crise économique (la clientèle était en grande partie américaine (des aficionados de la comédie musicale?)). Il est à vendre, si vous en avez les moyens….

http://www.lesliecaron-auberge.com/

Afin de garder la main, pour reprendre ses termes, Leslie Caron continue de tenir à l’occasion de petits rôles dans divers films internationaux. On l’a vue ainsi dans Fatale (1992) de Louis Malle ou Chocolat (2000) de Lasse Hallstrom. De courtes apparitions
Ce mois de février nous offre une rare opportunité d’applaudir en live cette star mythique de la comédie musicale . Leslie Caron joue au Châtelet dans l’opérette a little night with music (connue principalement pour le magnifique air Send in the clowns) aux cotés de Lambert Wilson. Pour ma part, j’ai réservé ma place! Et vous?

4 commentaires:

  1. J'ai réservé ma place, moi aussi, pour la soirée du 15 !... Après la défection de K.S Thomas, et le décès de Georges Wilson, espérons que le malheur épargnera Leslie !...
    Amitiés...

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  2. J'y vais le 20! tu me raconteras!
    Amitiés

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  3. Excellent article qui accompagne avec brio une si brillante carrière.J'avais vu Leslie CARON en répétition et en cours de dans du matin à l'Opéra d'ALGER en 1953...je l'ai revue au CHATELET: toujous la même présence assurée d'une sensibilité et d'un esthétisme incomparables: un bonheur pour tous ceux que LESLIE enchante,
    jacques GHERARDI ,mars 2010.

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  4. Merci Jacques!
    Le spectacle au Châtelet était magnifique et Leslie Caron a vraiment gardé le charisme d'une grande star.

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